Tous ceux qui ont fait des études ont sans doute rencontré à cette occasion des individus d’une anxiété maladive à l’approche des examens. Pour certains d’entre eux, il était même impossible d’arriver à les « rassurer ». Pourtant, dans certains cas, en se basant sur leurs résultats antérieurs généralement bons voire très bons, rien ne permet d’expliquer rationnellement la véritable raison de cette anxiété. Norem & Cantor (1986a, 1986b) estiment au contraire que cette anxiété n’a rien d’irrationnelle et qu’elle est l’une des composantes de ce qu’ils ont appelé le pessimisme défensif (defensive pessimism). Pour Norem & Cantor (1986a, 1986b), le pessimisme défensif est une stratégie qui fait la médiation entre l’expectation, l’anxiété et la performance dans une situation de prise de risque. Cette stratégie implique la mise en place d’une expectation d’échec particulièrement irréaliste de façon à utiliser l’anxiété qu’elle génère et de l’utiliser pour empêcher une chute de la performance. Le pessimisme défensif n’est donc pas à confondre avec une stratégie d’auto-handicap (Jones & Berglas, 1978). En effet, contrairement aux stratégies d’auto-handicap, le pessimisme défensif n’est pas une stratégie d’échec mais de réussite. Les individus qui utilisent cette stratégie imaginent le pire afin de se motiver pour le meilleur, ils dopent leurs efforts pour empêcher l’issue funeste.
De plus, Norem & Cantor (1986a, 1986b) estiment que cette stratégie est particulièrement utilisée chez les individus qui ont une faible estime d’eux-mêmes. En effet, ces derniers ne chercheraient pas à biaiser la réalité de leur l’échec en comparaison des individus qui ont une forte estime d’eux-mêmes. Dans l’une de leurs expériences, Norem & Cantor (1986b, expérience 2) montrent que le fait de soutenir l’estime de soi des individus qui utilisent la stratégie du pessimisme défensif a un impact négatif sur leurs performances. Dans cette expérience, les expérimentatrices ont sélectionné des étudiants pour leur profil ; soit particulièrement pessimiste, soit optimiste bien qu’ils aient des évaluations universitaires identiques (utilisation de questionnaires distribués en début d’année universitaire). Les étudiants étaient alors conviés à une expérience pour étudier le raisonnement.
Avant de commencer l’expérience, les étudiants devaient explicitement indiquer leur niveau (GPA). Pour la moitié d’entre eux, l’expérimentateur indiquait qu’avec un tel niveau, ils n’auraient aucun mal à réussir les tests de l’expérimentation (condition d’encouragement) et pour l’autre moitié l’expérimentateur ne faisait aucun commentaire. Conformément aux hypothèses (Norem & Cantor, 1986b, expérience 2), les pessimistes défensifs estiment qu’ils vont avoir des scores plus faibles aux différents tests et ont un niveau d’anxiété nettement plus élevé. Les analyses révèlent également un effet d’interaction entre les variables optimistes/pessimistes et encouragement/sans encouragement. Les pessimistes défensifs qui ont été encouragés obtiennent de moins bons scores. Les analyses sur les tests d’estime de soi montrent également que les étudiants pessimistes défensifs ont une meilleure estime d’eux-mêmes quand ils ont été encouragés alors que comparativement l’encouragement n’a pas eu d’impact sur les individus optimistes.
Représentation intégrée du pessimisme défensif (d’après Norem & Cantor, 1986)