Vallerand et ses collaborateurs (2003) donnent au concept de passion non seulement un nouveau socle conceptuel mais lui fournissent en plus une base empirique solide qui depuis à été utilisée dans différents domaines comme le sport (Vallerand, Mageau, Elliot, Dumais, Demers, & Rousseau, 2008) ou les jeux vidéo (Wang & al., 2008), etc.
D’une manière générale, ils définissent la passion comme une inclinaison forte envers une activité que les individus aiment, trouve importante et dans laquelle ils investissent du temps et de l’énergie.
La nouvelle conception de la passion qu’ils proposent repose sur la théorie de l’autodétermination de Deci & Ryan (2002 ). Plus précisément, ils se basent sur l’intégration organismique selon laquelle les individus sont plus enclins à pratiquer des activités qui sont en accord avec leurs besoins fondamentaux. Certaines activités peuvent donc devenir partie intégrante du self alors que d’autres restent pratiquées sous des pressions externes qui peuvent être plus ou moins bien internalisées.
Pour Vallerand & al. (2003), il existe des passions obsédantes et d’autres qui sont harmonieuses. Ces deux formes passionnelles se distinguent de la manière dont elles sont intégrées au self de l’individu. Les passions harmonieuses sont le résultat d’un processus d’internalisation qui s’est déroulé de manière autonome ayant abouti à l’intégration de l’activité à l’identité de l’individu. En référence à l’intégration organismique, un tel développement passionnel se déroule quand l’individu accepte librement de pratiquer l’activité, quand il considère qu’elle a de la valeur sans qu’il soit nécessaire de soutenir sa pratique par des contingences externes comme des récompenses, des punitions ou des pressions de toute nature. Dans ce cas, la passion occupe un espace important mais sans pour autant être démesurée par rapport aux autres aspects de la vie de l’individu. Les passions contrôlées sont la résultante d’une forme de contrôle de l’internalisation de l’activité au niveau du self. Cette internalisation est le fruit de pressions inter ou intra-personnelles liées au fait de différentes contingences attachées à la pratique de l’activité, comme des formes de valorisations adressées à l’estime de soi ou encore parce que le niveau d’excitation devient si important qu’il dépasse la capacité de contrôle du self. Ces formes de contingence contrôlent l’individu plutôt que le contraire. Dans la mesure où cette forme passionnelle prend le contrôle de l’individu, elle occupe une place démesurée dans son identité, provoquant des conflits avec ses autres occupations.
Dans une série d’étude, Vallerand & al. (2003) montrent que conformément aux prédictions, ces deux formes passionnelles rendent compte de résultats relativement différents. Une première étude effectuée auprès d’étudiants, montre que les activités qu’ils considèrent comme passionnantes sont corrélées significativement avec le « flow » (Csikszentmihalyi & Lefevre, 1989), les émotions positives et la concentration (uniquement) si ces dernières sont considérées comme harmonieuses. À l’inverse, les passions obsédantes sont corrélées significativement avec les émotions négatives, les cognitions négatives, la honte ou l’anxiété.
D’autres résultats montrent également que les passions obsédantes sont associées avec une persistance rigide qui ne tient pas compte de limites et qui peut aboutir à une prise de risque importante et irraisonnée. Ce dernier résultat est à mettre en relation avec les comportements de jeux compulsifs qui s’observent notamment dans les jeux d’argent. Vallerand & al. (2003) montrent que ces derniers ont des scores significativement plus élevés sur l’échelle des passions obsédantes.