La théorie motivationnelle de Miner (1993) est portée par une vision pragmatique des motivations utiles et nécessaires en situation de travail. Elle cherche à expliciter les mécanismes motivationnels de l’homme en situation professionnelle. Partant de cette situation, Miner n’a aucun mal à montrer que les situations de travail ne sont pas équivalentes. Il part de ce constat pour estimer que la question centrale n’est pas tant de savoir si le salarié est motivé, mais plutôt de s’interroger sur l’adéquation entre la motivation du salarié et le contexte de travail dans lequel il se trouve. À ce niveau, il estime que la réussite des organisations dépend, dans une grande mesure, des rôles que doivent y tenir les individus. La question de la motivation au travail est donc la question de la motivation pour un rôle donné qui, lui-même, n’a de sens que dans une organisation donnée. Chaque organisation s’appuie sur des individus clefs qui doivent tenir des rôles qui, pour être tenus correctement, doivent s’appuyer sur différentes formes de motivations. L’organisation du monde professionnel connaît quatre grandes formes.

1 – Dans les organisations hiérarchiques, c’est le fait d’être au niveau le plus élevé qui permet d’avoir un rôle clef dans l’organisation.

2 – Les organisations professionnelles, basées sur l’utilisation des connaissances et de l’expertise, regroupent les professions libérales tels les médecins ou les avocats.

3 – Les organisations entrepreneuriales sont avant tout des systèmes basées sur le mérite individuel de celui qui s’engage personnellement dans son activité, comme c’est le cas pour l’activité artisanale ou commerciale.

4 – Les organisations groupales sont caractérisées par un mode de prise de décision qui se construit soit par consensus, soit à la majorité et avec un système de leadership qui est souvent rotatif, comme c’est le cas pour les associations ou certaines fondations.

Dans ces quatre grandes formes d’organisation, l’impact de la motivation est médiatisé par les contraintes définies par les rôles qu’il est nécessaire d’y tenir. Miner (1993) estime que sa théorie se trouve au niveau méso car elle articule l’organisation (niveau macro) avec l’individu (niveau micro). En fonction de leurs motivations certains individus vont être plus adaptés à certains types d’organisation alors que, pour d’autres, ce sera le contraire.

Miner décrit ces motivations, organisation par organisation (il s’agit à chaque fois pour lui d’une théorie motivationnelle des rôles spécifiques à une organisation donnée) :

  • Dans les organisations hiérarchiques, Miner estime que les 6 rôles suivants sont essentiels au fonctionnement efficient du système : entretenir des relations positives avec l’autorité, être en compétition avec les pairs, imposer ses volontés aux subordonnés, agir avec affirmation, se différencier du groupe, être performant dans les activités routinières.
    - Celles-ci doivent être sous-tendues par les motivations suivantes : attitudes favorables envers les supérieurs, désir de compétition, désir d’exercer le pouvoir, désir de s’affirmer, désir d’être distinct et différent, désir d’effectuer ses obligations journalières consciencieusement.
  • Dans les organisations de type professionnel, ce sont cinq rôles qui doivent être pris en compte : acquérir des connaissances, agir de façon indépendante, apporter de l’aide, chercher à acquérir un certain statut, exhiber sa conscience professionnelle. Ces cinq rôles vont de pair avec les motivations suivantes : désir d’apprendre et d’acquérir des connaissances, désir d’être indépendant, désir d’obtenir un certain statut, désir d’apporter son aide, s’identifier aux valeurs de la profession.
  • Dans les organisations de type entrepreneuriales on cherche à : s’accomplir en tant qu’individu, éviter les risques, rechercher les résultats de son comportement, innover personnellement, planifier des objectif. Les motivations sur lesquelles s’appuie l’organisation entrepreneuriale sont les suivantes : désir d’accomplir à la sueur de son front, désir d’éviter les risques, désir de feedback sur ses performances, désir d’introduire des solutions innovantes, désir d’établir des buts et des plans.
  • Dans une organisation groupale, les rôles déterminants consistent à : interagir efficacement avec autrui, obtenir l’approbation du groupe, avoir des relations positives avec les pairs, Coopérer avec les pairs, agir démocratiquement. Les motivations qui sous-tendent ces rôles sont les suivantes : désir d’interagir socialement et de s’affilier, désir de sentir que l’on fait partie d’un groupe, attitude favorable envers les pairs, désir d’avoir des relations de type coopératif ou collaboratif, désir de participer à un processus démocratique.

La théorie de Miner ne consiste donc à pas de décrire la motivation à un niveau individuel, mais plutôt de voir en quoi les motivations d’un individu donné sont adaptées aux caractéristiques d’une organisation. Par exemple, un individu avec un besoin important de pouvoir sera plus efficace dans une organisation de type hiérarchique que dans une autre forme d’organisation.

Représentation intégrée des théories motivationnelles des rôles
(d’après Miner, 1993)