En 1897, Triplett observe que des coureurs à vélo vont plus vite lorsqu’ils courent ensemble que lorsqu’ils sont seuls. Pour vérifier cette observation, il fait une étude où il compare la performance des mêmes sujets lorsqu’ils sont seuls contre la montre, à celle qu’ils obtiennent quand ils sont opposés à un autre coureur. Les résultats montrent que le coureur va plus vite quand il est confronté à un autre individu.
L’une des définitions les plus citées pour caractériser la facilitation sociale, celle d’Allport (1924), estime qu’elle décrit une augmentation de la réponse simplement en voyant ou en entendant les autres faire le même mouvement. Les études dans ce domaine ne se sont pas limitées à l’homme puisque de très nombreuses observations ont été faites chez l’animal. Par exemple, l’une de ces études a montré que les poulets mangent plus lorsqu’ils sont en groupe que lorsqu’ils sont seuls.

Différents paradigmes ont été utilisés pour étudier la facilitation sociale. Le paradigme de l’« audience » fait référence aux études qui ont utilisé des spectateurs passifs. Dans le paradigme de la « coaction », deux individus font en présence l’un de l’autre la même activité comme dans l’étude de Triplett. Enfin, dans le paradigme « interactif », les individus sont également ensemble mais au lieu de pratiquer l’activité indépendamment, ils travaillent de concert. Cette richesse paradigmatique s’explique en partie par la présence de résultats contradictoires. La présence d’autrui ne produisant pas, dans certaines situations expérimentales, l’augmentation escomptée des performances (Zajonc, 1965). De même, il existe différentes théories pour expliquer la facilitation sociale. La théorie que propose Zajonc (1965) a l’avantage de fournir une explication simple des résultats contradictoires. Cette théorie d’inspiration béhavioriste postule que la présence d’autrui génère un drive. Pour Zajonc, la facilitation sociale provoque un surinvestissement énergétique de la réponse dominante. Lorsqu’un individu fait une activité en groupe, le drive va apporter une énergie supplémentaire au stimulus le plus fréquent. Si c’est la réponse appropriée qui est la réponse dominante, alors, la présence d’autrui a pour effet d’augmenter les performances. Dans le cas inverse, les performances chutent.

L’expérience de Cottrell & al. (1968) permet d’illustrer la théorie de Zajonc (1965) à l’aide d’un paradigme de type mnémonique. Les auteurs ont présenté des logatomes avec un taux de répétition différent pour chacun d’entre eux (de 1 à 25 répétitions). Après la présentation du matériel, les sujets devaient effectuer une tâche de reconnaissances (les logatomes cibles sont présentés avec des distracteurs). Les sujets sont testés seuls (condition « seul »), en présence de deux autres personnes (condition « audience ») et en présence de deux personnes avec les yeux bandés (condition « audience aveugle »). Les résultats montrent que les sujets dans la condition « audience » font plus d’erreurs sur les logatomes les plus fréquents par rapport à la condition « seul ». En revanche, les sujets de la condition « audience » font moins d’erreurs sur les logatomes les moins fréquents. Enfin, les sujets dans la condition « audience aveugle » ont des résultats comparables à ceux dans la condition « seul ». Les résultats dans la condition aveugle font dire à Cottrell & al. (1968) que contrairement à Zajonc (1965), il ne s’agit pas d’un drive primaire mais d’un drive secondaire.

Par la suite, la facilitation sociale a donné de multiples théorisations (Bond, 1982 ; Baron & al., 1978). Actuellement elle semble bénéficier d’un regain d’intérêt dans le cadre des technologies de l’information et de la communication (TIC) au travers de la constitution de réseaux et donc de groupes d’individus. Dans le cadre d’une étude utilisant le paradigme CASA (computeur as social actor) qui étudie la façon dont la machine peut interagir avec l’homme, Hall & al. (2008) montrent que la présence d’icônes a une action différente en fonction de la difficulté de l’activité, à l’image des postulats de Zajonc, dans le cadre de sa théorie de la facilitation sociale.

Représentation intégrée de la facilitation sociale
(d’après Triplett, 1897)