Le modèle des phases de l’action (Heckhausen, 1986 ; Heckhausen & Gollwitzer, 1987 ; Achtziger & Gollwitzer, 2008) est l’un des rares modèles qui intègre, en un ensemble cohérent, motivation et volition. Le modèle postule qu’il existe quatre phases, elles-mêmes entrecoupées de différentes intentions. Prises ensembles, ces quatre phases expliquent comment l’individu en vient à positionner des objectifs (goal setting), à prendre la décision de s’engager dans l’action (le fameux « passage du rubicon », cf. Achtziger & Gollwitzer, 2008) et enfin à agir en vue d’atteindre cet objectif (goal striving).

La première est la phase pré-décisionnelle (predecisionnal phase). Elle est purement motivationnelle. Durant celle-ci, l’individu délibère sur les différentes motivations qui le poussent à agir. Ces différentes formes motivationnelles s’incarnent dans des souhaits que formule plus ou moins explicitement l’individu. Ces souhaits sont pesés (en termes de coût/bénéfice) à la fois en termes de désirabilité (« différents types de motifs », dans le cadre du modèle intégratif de la motivation) et de faisabilité (« prédiction », dans le cadre du modèle intégratif de motivation). L’individu ne se limite pas aux conséquences à court terme, il peut aussi envisager les conséquences à long terme. À la fin de cette phase, une fois que l’individu a bien pesé le « pour » et le « contre » de chaque souhait, il est prêt à prendre ou non la décision de s’engager dans l’action. Pour Achtziger & Gollwitzer (2008), la décision est prise uniquement lorsque la phase pré-décisionnelle a atteint un certain niveau de clarification. Ce processus de délibération peut être raccourci en demandant aux personnes d’estimer sous toutes les coutures comment une des alternatives peut être l’objet d’une action (Gollwitzer, Heckhausen, & Ratajczak, 1990). Si l’individu décide d’en rester là, alors, les autres phases du modèle n’ont pas lieu d’être. Par contre, s’il décide de s’engager dans l’action, alors, il passe à la deuxième phase.

Lors de la phase pré-actionnelle (preactionnal phase), l’individu planifie son action. Il réfléchit aux moyens et aux stratégies à mettre œuvre pour mener à bien son action. En effet, l’individu est en général pris dans un flux d’activités et il doit, non seulement terminer celles qui sont en cours, mais aussi attendre le bon moment pour agir. Le point central de cette phase ne tourne plus autour de la motivation mais de la volition ; c’est-à-dire, autour des moyens à mettre en œuvre pour réaliser l’action. Les réflexions de l’individu une fois qu’il a « passé le rubicon » ne sont plus du tout les mêmes que celles qu’il avait avant (Gollwitzer, Heckhausen, Steller, 1990). Dans cette première phase volitionnelle, les réflexions sont orientées sur la mise au point d’un plan d’action pour le souhait sélectionné. L’implémentation d’intentions (Gollwitzer, 1999), c’est-à-dire le fait de spécifier où, quand et comment les objectifs doivent être atteints, facilite le passage à l’action au moment opportun pour l’individu (Gollwitzer, & Brandstatter, 1997).

La phase actionnelle (actional phase) est celle de l’action proprement dite. Durant cette phase, tous les efforts de l’individu sont engagés afin de permettre le dénouement préalablement projeté de l’action. Ces efforts sont facilités par la fermeté du but poursuivi et qui implique de résister aux difficultés rencontrées, fermeté qui permet également à l’individu d’initier à nouveau son action lorsque cette dernière est interrompue. Achtziger & Gollwitzer (2008) parle de « force volitionnelle ». Celle-ci explique le fait que l’individu persiste malgré les interruptions et les difficultés rencontrées lors de l’exécution de l’action. Durant cette phase, c’est la représentation du but dans lequel l’individu est engagé qui guide son action.

Enfin, la phase post-actionnelle se produit après que l’action ait été à son terme et que l’intention qui guidait l’action de l’individu ait été désactivée. C’est lors de cette phase que les individus mesurent le résultat de leur action. Si l’action a permis d’atteindre l’objectif, que s’était fixé l’individu, alors le but est désactivé. À l’inverse, si le résultat n’est pas satisfaisant alors le but n’est pas désactivé et l’individu va chercher à l’atteindre au cours d’une nouvelle tentative. Les individus qui subissent une défaite cuisante, en tentant d’atteindre un objectif, peuvent ainsi ne pas pouvoir se détacher de cet objectif. Lorsque l’objectif n’est pas atteint les personnes peuvent également diminuer leurs prétentions et désactiver l’objectif.

Représentation intégrée du modèle des phases de l’action
(d’après Heckhausen, 1986 et Achtziger & Gollwitzer, 2008)