Pour Weiner (2005), la motivation dans les situations d’accomplissement comme le sont les évaluations scolaires ou universitaires, doit nécessairement tenir compte de la recherche des causes qu’infère l’individu suite à une réussite ou à un échec. Deux systèmes attributionnels doivent être clairement distingués pour Weiner (2005). Le premier fait référence aux pensées et aux impressions qui entrent dans le cadre de ce qu’il appelle une théorie intra-personnelle de la motivation. Il s’agit d’évaluer l’impact que peuvent avoir les événements extérieurs (comme peut l’être une réussite ou un échec) du point de vue de l’individu. Le second tente de comprendre les pensées et les impressions des individus mais, cette fois, dans le cadre d’une théorie interpersonnelle de la motivation. Autrement dit, il s’agit de considérer la motivation des individus qui en observent d’autres en train d’obtenir tel ou tel type de résultat (comme un échec ou une réussite). Dans la mesure où la motivation interpersonnelle (métaphore de l’homme comme juge) s’appuie principalement sur la théorie attributionnelle des émotions, que ce même auteur a développée par ailleurs (Weiner, 2006) et qui est présentée plus haut, les lignes suivantes vont être principalement consacrées à la présentation de sa théorie intra-personnelle de la motivation.
La conception motivationelle et attributionnelle de Weiner s’appuie sur la métaphore de l’homme comme scientifique. Selon cette métaphore, l’individu, lorsqu’il est confronté à un événement, raisonne, fait des inférences, des déductions et donc des attributions afin de déterminer les causes de cet événement. Pour Weiner (2005), la probabilité qu’un individu en vienne à tenir un raisonnement attributionnel coûteux en ressources cognitives est plus forte à partir du moment où l’individu est confronté à un résultat non-attendu négatif ou important. Dans le cas contraire, c’est l’affect qu’il ressent (positif ou négatif) qui va plus probablement le faire, éventuellement, passer à l’action, et ce, sans tenir d’un quelconque raisonnement. Si l’individu passe par un raisonnement sur les causes permettant d’expliquer cet événement, il en vient, par là-même, à tenir compte d’une multitude d’éléments comme ceux liés à son passé, les normes sociales en vigueur et les règles causales, plus ou moins biaisées, qui régissent tout raisonnement en matière d’attribution. Pris dans leur globalité, ces différents éléments vont le conduire à estimer que c’est la présence d’une cause plutôt que d’une autre (chance, compétence, effort…) qui est à l’origine de l’événement. Ces causes entrent, pour Weiner (2005), dans l’une des trois dimensions attributionnelles qui caractérisent toute attribution dans un cadre motivationnel :
1) Locus - Cette dimension s’inspire des travaux de Rotter (1966) sur le locus control. Pour Rotter, les causes peuvent être situées dans (interne), ou à l’extérieur de (externe), l’individu. Wiener préfère cependant distinguer cette dimension qu’il appelle « locus de causalité », du locus de control de Rotter. Ainsi, l’effort, les capacités, l’humeur ou encore la fatigue, sont des causes externes. La difficulté de l’activité et la chance sont des causes externes. Weiner précise que la topologie des différentes causes sur cette dimension causale n’est pas totalement invariante. Par exemple, la chance peut être considérée comme une cause interne (« je suis chanceux ») ou externe (« cet événement nous a, à tous, porté chance »). De plus, les événements peuvent avoir des significations particulières pour les personnes qui peuvent ainsi, contre l’avis général, avoir une classification plus personnelle de certaines causes.
2) Stabilité - Wiener se réfère cette fois à Heider (1958) pour distinguer les dispositions ou caractéristiques relativement fixes, telles que les capacités des facteurs fluctuants comme l’effort ou la chance. La dimension de la stabilité permet donc de différencier les causes stables (difficulté de la tâche ou capacité) de celles qui sont instables (effort, humeur).
3) Contrôlabilité - Certaines causes comme l’effort peuvent faire l’objet d’une altération volontaire et sont donc, à ce titre, considérées comme contrôlables. À l’opposé, l’individu n’a aucune prise sur certaines causes comme les difficultés, la chance ou la capacité, qui sont donc considérées comme incontrôlables.
Pour Weiner (2005), ces attributions vont être les déterminants d’actions motivées au travers des émotions et des expectations qu’elles sont susceptibles de générer. La stabilité est en lien avec l’expectation de réussite ou d’échec futur. Les deux autres dimensions, le locus et la contrôlabilité, vont avoir principalement des impacts émotionnels. Le locus influence la fierté et l’estime de soi que peut ressentir un individu en accomplissant quelque chose. La contrôlabilité, en conjonction avec le locus, pour sa part, influencera la honte ou la culpabilité lorsque l’individu ne sera pas en mesure d’atteindre l’objectif fixé.
Au final, l’attente de succès ainsi que les différentes émotions ressenties par l’individu vont produire un impact sur le comportement qu’il va adopter dans une perspective d’accomplissement.